dimanche 23 novembre 2008

André Vezinhet, Président du Conseil général de l'Hérault

Comment expliquez-vous que l'Etat se soit toujours tourné vers les Conseils généraux quand il s'est agit de transférer des compétences aussi stratégiques que l'action sociale et l'aménagement du territoire ?

C'était bien une marque de reconnaissance de leur capacité d'adaptation et de mise en oeuvre des politiques publiques innovantes, n'est-ce pas ? Les personnes âgées et handicapées, la petite enfance, les routes, les collèges, les services d'incendie et de secours, la protection de l'environnement : qui va mener une politique de proximité dans ces domaines tellement sensibles si l'on supprime les Départements ? Qui sera garant qu'elle est menée de façon équitable sur le territoire ?

Le RMI, le fonds d'aide aux jeunes, l'allocation personnalisée d'autonomie pour les personnes âgées dépendantes... Autant de dispositifs qui prennent leur origine dans une expérimentation départementale. Le Conseil général, c'est aussi l'institution qui a mis les principes du développement durable en application bien avant la tenue du « Grenelle de l'environnement ». Dans ce domaine, les Départements n'ont pas fondé leur stratégie sur le discours, mais sur l'action.

Et puis, à l'heure où nous appelons au resserrement des liens entre le citoyen et ses élus, allons-nous le priver du rapport direct qu'il peut avoir avec un homme ou une femme, seul élu local issu du scrutin uninominal, représentant un territoire dans lequel chacun peut se représenter ?

L'urgence serait peut-être de doter notre pays de Régions à la dimension de l'Europe, à l'image des landers allemands ou des grandes unités territoriales espagnoles, comme la Catalogne.
C'est seulement à cette échelle que nous pourrions être des interlocuteurs crédibles pour l'Europe. A l'heure ou celle-ci s'agrandit à l'Est, notre voix est dramatiquement inaudible.

Pour revenir au Département, et à condition bien sûr que son utilité soit finalement reconnue, il y a de nécessaires évolutions à envisager, dans la forme et dans le fond.

Il ne faut pas s'étonner par exemple de la perplexité du citoyen votant aux élections cantonales pour des conseillers généraux siégeant à l'Assemblée départementale, qui se renouvelle par moitié tous les 3 ans ! Il ne faut pas non plus se cacher la sous-représentativité des femmes dans ces assemblées. Il faut aussi admettre que l'on a transféré sans cesse des charges nouvelles aux Départements sans adapter leur capacité à pouvoir les financer autrement que par l'impôt local.
De ce fait, on assiste à une grande inégalité de moyens entre les Départements français. Ainsi, le potentiel financier par habitant du Conseil général des Hauts-de-Seine, c'est presque trois fois celui de la Haute-Loire. L'invention d'un dispositif de péréquation entre départements est une exigence démocratique, pour libérer la croissance des territoires qui en ont le plus besoin.