vendredi 12 décembre 2008

Balladur prépare son big-bang

Le «mille-feuilles» tremble. Communes, départements, régions : c’est l’effervescence à tous les étages. Depuis que Nicolas Sarkozy a ouvert, en septembre, le «grand chantier» de la réforme de l’organisation territoriale, les élus se bousculent pour donner leurs avis. Et surtout pour faire entendre leurs craintes. Au niveau national, pas moins de quatre groupes de travail sont à l’œuvre. La commission installée par le chef de l’Etat et présidée par Edouard Balladur, le groupe de travail parlementaire voulu par Jean-François Copé, la mission du Sénat de Gérard Larcher et le comité créé par les associations d’élus locaux, majoritairement de gauche.

«Mort». Dans les territoires, chacun se sent potentiellement menacé par le «big-bang» annoncé. Il est question de fusions de régions, d’évaporation de départements et de dissolutions de communes. Ces dernières semaines, les congrès des grandes associations d’élus (ARF, ADF, AMF) ont dit leurs inquiétudes à Sarkozy ou à ses ministres. Hier, Edouard Balladur est allé en débattre avec les élus des collectivités de Rhône-Alpes, réunies par le président PS de région Jean-Jack Queyranne (lire ci-dessous).

Devant les députés UMP réunis mercredi à l’Elysée, le chef de l’Etat a réaffirmé sa détermination. La commission Balladur devra avoir rédigé son rapport début février. Ses propositions seront débattues pendant quelques mois. Et, après les élections européennes de juin 2009, le gouvernement se lancera dans la rédaction d’un projet de loi qui pourrait être discuté au Parlement à partir de l’automne.

Alors qu’approche l’échéance de la remise de son rapport, Edouard Balladur et les élus qui l’entourent (Pierre Mauroy et André Vallini pour le PS, Gérard Longuet et Dominique Perben pour l’UMP) commencent à laisser filtrer leurs premières conclusions.

Balladur propose une nouvelle organisation territoriale autour de deux couples : intercommunalités et communes d’une part, régions et départements d’autre part. Pour leur donner plus d’autorité, l’exécutif des structures intercommunales devrait, selon l’ex-Premier ministre, être élu au suffrage universel. Mais les parlementaires de la majorité sont, selon le sénateur UMP Jean-Patrick Courtois, très majoritairement opposés à ce projet qui risque d’entraîner «la mort des maires». Mercredi, à l’Elysée, Nicolas Sarkozy leur a donné raison. Il n’empêche, la réforme devrait encourager une forte intégration : les communes pouvant être aux intercommunalités ce que les arrondissements sont aux villes de Paris, Lyon ou Marseille.

«Mécanique». Concernant le couple département-région, la majorité est favorable à l’élection de «conseillers territoriaux» qui siégeraient dans les deux assemblées pour y délibérer des politiques bien distinctes. Si elle est retenue, cette proposition implique la suppression des élections prévues en 2010. Les élus des régions et des départements seraient renouvelés en même temps en 2011, date des cantonales. Nicolas Sarkozy a confirmé qu’il n’excluait pas ce scénario, «si un consensus suffisant se dégage».

Comme le chef de l’Etat, Balladur insiste sur le fait que la diversité de la France appelle des solutions diverses. Selon les territoires, les fusions de collectivités seraient envisagées au niveau d’agglomérations, de départements ou de régions. Concernant les régions, André Vallini juge possible et souhaitable de faire descendre leur nombre de 22 à une «quinzaine». L’élu PS a reconnu hier qu’il sera «difficile» de mettre d’accord «les 500 000 élus de France avec leurs susceptibilités». Mais, grâce à l’épatante «mécanique intellectuelle» d’Edouard Balladur, le député socialiste croit au moins au consensus au sein de la commission.

L’ancien ministre assure de son côté que les élus qu’il rencontre sont «très ouverts» à l’idée d’une réforme. Depuis un an, il «perçoit nettement» une «envie de changement». Il n’a plus que quelques semaines pour traduire cette envie en projet de réforme.