vendredi 18 septembre 2009

Alain Rousset: "L'Etat est un Ponce Pilate pervers!"

LExpress

Le gouvernement envisage de permettre aux régions d'accroître les impôts sur l'essence pour financer les chantiers du Grenelle de l'environnement. "Un piège politique grossier", alerte Alain Rousset, président de la région Aquitaine.

La taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP) est la principale imposition payée sur le carburant ou le fuel domestique. Depuis 2006, les régions en perçoivent une partie (environ 20%) pour compenser les nouvelles charges qui lui ont été transférées par l'Etat.

Les conseils régionaux peuvent décider d'augmenter leur part de TIPP mais dans une certaine limite: 1,15 centime par litre de gazole et 1,77 centime par litre de super.

Devant le poids financier des grands chantiers à venir (et notamment ceux prévus par le Grenelle de l'environnement), le Figaro révèle que l'Etat prévoit dans son projet de loi de finances pour 2010 de déléguer le financement de certains projets aux régions (les lignes TGV par exemple). En échange de quoi, ces dernières auraient la possibilité d'augmenter la TIPP dans une plus large mesure.

Un cadeau empoisonné pour Alain Rousset, président de la région Aquitaine et de l'Association des régions de France (ARF), interviewé par LEXPRESS.fr.

Alain Rousset, que vous inspire cette décision qui pourrait permettre aux régions d'augmenter plus amplement la TIPP?

C'est une double absurdité. D'une part, l'Etat diminue les impôts au profit des plus riches et au détriment de la justice sociale. Et dans le même temps, il demande aux régions de les augmenter pour financer des projets qui sont de sa compétence, comme les lignes grandes vitesses (LGV).

D'autre part, la TIPP est un impôt en régression, avec les politiques de développement des transports collectifs, l'arrivée de véhicules propre,... Elle rapportera donc de moins en moins. C'est un piège politique grossier. Les régions sont en total désaccord avec cette mesure.

Cette mesure correspond-elle à une plus grande décentralisation ou à un désengagement de l'Etat?

Si l'Etat décentralise et donne les ressources aux collectivités qui vont avec, il n'y a pas de désengagement. Mais ce n'est pas le cas ici. On nous met des charges sur les épaules qui ne sont pas de nos compétences.

Je vous signale d'ailleurs que l'Etat prend de plus en plus de place dans le budget des collectivités. Il réforme la fiscalité pour diminuer notre autonomie fiscale et nous faire dépendre de lui. On est sous tutelle, pris en tenaille.

Le pire c'est quand j'entends Eric Woerth, ministre du budget, vilipender les collectivités qui, soi-disant, gaspillent l'argent public et augmentent les impôts. Mais nous augmentons les impôts parce que le gouvernement nous demande de le faire! Je vais vous dire: l'Etat est un Ponce Pilate pervers.

Comment comptez-vous manifester votre opposition?

On a demandé à rencontrer le Président de la République. Je vais demander un rééquilibrage de la taxe professionnelle en faveur du couple région-intercommunalité qui doit être un moteur pour aider les entreprises, la recherche, l'innovation. Tout particulièrement en cette période de crise.