mardi 15 décembre 2009

Dernier coup de théâtre sur la réforme de la taxe professionnelle



Source : Les Echos

Députés et sénateurs devaient s'accorder, la nuit dernière, sur les derniers contours de la réforme de la taxe professionnelle. Ils ont rétabli un lien direct entre impôts et territoires, y compris pour les départements et les régions.

C'est un bras de fer à huis clos qui s'est déroulé, hier et jusque tard dans la nuit, pour départager les députés et les sénateurs sur les derniers contours de la loi de Finances 2010. La commission mixte paritaire, dernière étape du marathon budgétaire, a été, cette année, particulièrement chargée. D'accord sur les grandes lignes, les 7 sénateurs et les 7 députés ont passé plusieurs heures à fixer les conditions de partage des nouveaux impôts locaux, suite à la suppression de la taxe professionnelle. Sur ce sujet, deux points de désaccord subsistaient à l'issue de l'examen dans les deux chambres.

Premier sujet : la répartition du nouvel impôt sur la valeur ajoutée. Les députés défendaient une version « économique », selon laquelle l'installation d'une entreprise doit apporter un surcroît d'impôt immédiat pour la commune d'accueil. « Il y a beaucoup plus de territoires qui ont à y perdre qu'à y gagner », indique un spécialiste du dossier. Les sénateurs, eux, défendaient une version plus solidaire, selon laquelle le produit de l'impôt doit bénéficier, in fine, aux collectivités qui en ont le plus besoin. Pour chaque département, par exemple, les ressources versées par l'Etat auraient été fonction de la valeur ajoutée des entreprises, de sa population, de la longueur de sa voirie et du montant qu'elle verse en prestations sociales. Mais, après deux heures et demi de débat, les députés ont obtenu gain de cause par 9 voix contre 4, avec le soutien des deux sénateurs de l'opposition : l'impôt sur la valeur ajoutée sera collecté directement par les collectivités, au risque de pénaliser celles qui n'accueillent que des PME, non imposées en deçà de 500.000 euros de chiffre d'affaires.

Deuxième sujet : l'abattement sur le foncier proposé pour l'industrie doit-il peser uniquement sur les communes, ou sur les autres échelons territoriaux ? Les députés avaient proposé un abattement de 15 % sur le foncier bâti et sur le foncier des entreprises, ce qui pénalise les départements et les communes. Les sénateurs, eux, plaidaient pour un seul abattement de 35 %, mais sur le seul foncier des entreprises (collecté par les communes). Les sénateurs ont eu gain de cause, au taux de 30 %, ce qui sera un peu moins pénalisant pour les grandes communes, qui perçoivent le plus de taxe professionnelle aujourd'hui.
Un an de sursis

Plusieurs autres sujets devaient être tranchés en cours de soirée. Concernant l'investissement locatif, les députés espéraient bien reporter, à 2011, le verdissement de la fiscalité. Les investisseurs devraient donc avoir un an de sursis avant que les logements fortement consommateurs d'énergie donnent lieu à une moindre réduction d'impôt (20 % au lieu de 25 %). Les sénateurs, eux, devraient obtenir que le dispositif ne soit pas pérennisé au-delà de 2012. Ils avaient également bon espoir de maintenir le durcissement du plafond global des niches fiscales, en ramenant le plafond par ménage de 25.000 euros, plus 10 % des revenus, à 20.000 euros, plus 8 % des revenus. Mais le gouvernement, qui juge la mesure « sans intérêt », peut encore annuler la mesure avant son vote final, vendredi.

Suite

lundi 7 décembre 2009

Le Sénat entérine et encadre la réforme de la taxe professionnelle

Source : Les Echos

Cette fois, Jean-Pierre Raffarin (UMP), le « frondeur » de la majorité sur la réforme de la taxe professionnelle, est venu. Absent lors de l'examen par le Sénat de la partie concernant la suppression de cet impôt, l'ancien Premier ministre est intervenu samedi à l'occasion du débat sur les compensations pour les collectivités locales, à savoir les deux nouvelles contributions des entreprises, foncière et sur la valeur ajoutée. « Les conditions de ce débat ne nous satisfont pas du tout », a-t-il attaqué, regrettant qu'il n'y ait pas eu au préalable un « débat économique ».


« Nous allons parler de valeur ajoutée, est-ce que vraiment les investissements et la taxe professionnelle sont les causes des délocalisations, je n'en suis pas sûr du tout. (…) Je ne suis pas en mesure aujourd'hui de savoir si la valeur ajoutée est une meilleure assiette pour l'avenir de notre économie. Je me demande si dans cinq ans on ne qualifiera pas à nouveau cette contribution d'impôt idiot parce qu'elle pénalise la valeur d'avenir », a-t-il asséné, en regrettant aussi qu'il y ait « manqué d'un débat sur la décentralisation. Veut-on jouer la carte de la responsabilité des élus ? Si oui, il faut des taux locaux pour des impôts locaux. Si l'on met des impôts locaux avec des taux nationaux (ce sera le cas de la contribution sur la valeur ajoutée, NDLR), on nationalise l'impôt local. »
Clauses de revoyure

Le sénateur de la Vienne a cependant approuvé les clauses de revoyure très strictes proposées par la commission des Finances pour ajuster la réforme, au 31 juillet 2010 et en 2011 après le vote de la réforme des collectivités. Il a aussi salué le dispositif de répartition des nouveaux impôts, entièrement réécrit. Christine Lagarde a rappelé à l'ancien Premier ministre que le gouvernement s'était « beaucoup inspiré du rapport Fouquet publié en 2004 sous votre autorité, qui concluait que la valeur ajoutée était la moins mauvaise pour une nouvelle contribution ». La ministre de l'Economie a aussi donné son feu vert à la nouvelle répartition des recettes, qui met à égalité toutes les collectivités, qu'elles attirent des petites ou des grandes entreprises (« Les Echos » du 2 décembre). Elles disposeront de ressources dépendant de la valeur ajoutée des entreprises présentes sur leur territoire : quel que soit leur chiffre d'affaires, celles-ci acquitteront un impôt local au taux de 1,5 %. Mais elles se verront restituer la somme qu'elles n'auraient pas dû payer via des dégrèvements (3,77 milliards). « Nous nous efforçons de définir l'architecture d'une nouvelle fiscalité locale », a souligné Philippe Marini (UMP), rapporteur du budget.
Les « deux pieds entravés »

« Rendant hommage » à ces travaux, Christine Lagarde a néanmoins tenté d'amender le dis-positif en transformant le dégrèvement en réduction d'impôt et en abaissant le taux de 1,5 % à 1,4 % (pour les entreprises dont le chiffre d'affaires est inférieur à 10 millions d'euros) pour ce calcul. « Sous une avalanche de roses, le gouvernement cherche à démolir l'oeuvre de la commission, afin de réduire le montant du dégrèvement à la charge de l'Etat », a critiqué Michel Charasse (RDSE). De fait, l'Etat devra assumer des dégrèvements augmentant chaque année au rythme du PIB, alors que les dotations n'auraient crû, dans le meilleur des cas, qu'au rythme de l'inflation. Jugeant « inexplicable » l'amendement, Jean Arthuis, président de la commission des Finances, a obtenu du gouvernement qu'il le retire. Mais le sujet sera au menu de la commission mixte paritaire (7 députés, 7 sénateurs). De même, Christine Lagarde a dû retirer un amendement rétablissant un ticket modérateur pour les collectivités qui, en relevant trop le taux de la cotisation foncière, conduirait des entreprises à dépasser le plafond de 3 % (qui concerne l'addition de la contribution foncière et de celle sur la valeur ajoutée). Là encore, le sujet a été renvoyé en CMP.

Pour la gauche, la messe est dite : les sénateurs PS ont dénoncé hier un « coup fatal porté à la décentralisation », estimant que « la chute de l'autonomie fiscale des collectivités est confirmée et même aggravée » et que l'allégement fiscal accordé aux entreprises pèsera au final sur les ménages. « Vous aviez déjà le boulet Tepa (loi sur les heures supplémentaires défiscalisées et le bouclier fiscal, NDLR) ; avec le boulet TP, vos deux pieds sont entravés », a lancé Nicole Bricq (PS).

Suite

mardi 1 décembre 2009

Les régions ne pourront bientôt plus lever l'impôt

Source : Les Echos

Outre la taxe professionnelle, les régions risquent fort de perdre le bénéfice des « impôts ménages » et de n'avoir pratiquement plus aucune marge de manœuvre pour lever l'impôt.

Geler les impôts régionaux sur toute la mandature à venir, ramenée à quatre ans pour permettre l'élection des conseillers territoriaux en 2014, ne sera pas la promesse de campagne la plus difficile à tenir. Le pouvoir de lever l'impôt dont disposent encore les régions va en effet se réduire très fortement. L'an prochain, comme les départements et les communes, ces collectivités auront définitivement perdu la main sur la taxe professionnelle (TP). Un impôt qui représente près du tiers de leurs rentrées fiscales (2,9 milliards d'euros sur 10 milliards) et dont le projet de loi de Finances 2010 a signé l'arrêt de mort. Cette ressource sera remplacée « à l'euro près » par une compensation de l'Etat et la cotisation complémentaire (CC), nouvel impôt économique assis sur la valeur ajoutée des entreprises et dont les régions ne pourront, à la différence de la TP, moduler le montant. Du fait de cette seule réforme, le taux d'autonomie fiscale des régions, qui est actuellement de 28 %, soit le niveau le plus faible de toutes les collectivités locales, chuterait à 16 %, selon l'Association des régions de France (ARF).

Nouvelle répartition

Ses experts s'attendent à le voir tomber plus bas encore. Car les conseils régionaux devraient aussi perdre le bénéfice des deux « impôts ménages » qui leur restent. Au terme du « bonneteau » qui doit se jouer la semaine prochaine au Sénat sur la nouvelle répartition des impôts locaux, départements et communes devraient se partager les parts de taxe sur le foncier bâti et de taxe sur le foncier non bâti des régions, soit moins de 2 milliards d'euros en 2007. Là encore, cette disposition devrait se traduire par une nouvelle baisse d'autonomie fiscale. « Nous passerions à 10 % », estime-t-on à l'ARF, où la probabilité d'un tel scénario ne fait guère de doute.

Au bout du compte, les assemblées régionales qui sortiront des urnes, à l'issue du scrutin de mars 2010, ne devraient plus pouvoir faire varier que les taux de la taxe sur les permis de conduire et de la taxe sur les cartes grises. La première rapporte seulement quelques millions d'euros, la quasi-totalité des régions (19 sur 22 en métropole) ayant fait le choix de ne pas la percevoir. La seconde est plus « rémunératrice » (près de 2 milliards) mais les taux appliqués sont à leur maximum. Pour les mêmes raisons, et hormis le Poitou-Charentes, les régions ne peuvent également jouer davantage sur la part variable de la taxe intérieure sur les produits pétroliers (TIPP), part chiffrée à 650 millions d'euros.

Suite