lundi 9 février 2009

Communes et intercommunalités : la Cour des Comptes demande des réformes

La Cour des Comptes dresse dans son rapport public annuel, un nouveau bilan de l'évolution des communes et de l'intercommunalités. Et elle constate une dérive persistante, au détriment de l'efficacité et de la démocratie.

Inadaptation à la gestion de l'eau, de l'assainissement

La rationalisation de la carte intercommunale, rappelle le rapport, devait passer par des extensions significatives des périmètres et un accroissement du nombre de fusions. Parallèlement, un grand nombre de syndicats devaient disparaître. Cette évolution n’a pas eu lieu. Les syndicats mixtes qui résultent par exemple de la substitution des communautés de communes à leurs membres dans les syndicats subsistants se sont maintenus alors que leur nombre avait déjà doublé entre 1999 et 2005 (3 029 contre 1 454). Ces syndicats traduisent « l'inadaptation du périmètre de bon nombre de nouvelles intercommunalités à la gestion des services publics (en particulier ceux de l'eau, de l'assainissement, voire des ordures ménagères) pour lesquelles les contraintes géographiques (bassin versant) sont essentielles. »

Effectifs partout en hausse



La Cour pointe de nouveau le problème épineux des effectifs. D’abord pour rappeler que « les effectifs d'agents employés par les communes et les intercommunalités sont connus jusqu'à 2006 seulement. De 2001 à 2006, ils ont augmenté de plus de 50 % dans les EPCI, passant de 138 000 à 216 000. Cette augmentation résulte de l'accroissement du nombre des intercommunalités, des recrutements pour gérer des services publics » Dans le même temps, « les effectifs des communes n'ont pas été réduits ; ils ont même augmenté de 29 000 agents, sans qu'il soit possible de répartir cette augmentation en distinguant les communes membres d'une intercommunalité de celles qui demeurent isolées (environ 3 150) »



Eclatement du service et doublons

Cependant, malgré les réorganisations, le rapport note que « les contrôles des chambres régionales des comptes font état, en écho aux observations de la Cour en 2005, d'exemples manifestes de gestion éclatée d'un service public, génératrice de coûts additionnels, voire de doublons » La Cour, trois ans après son rapport public particulier de novembre 2005, "maintient une appréciation critique sur la carte, le contenu et le coût de l'intercommunalité ». « Les améliorations constatées restent insuffisantes, incomplètes et trop lentes face à un mouvement intercommunal qui prend des formes assimilables à un nouvel échelon de collectivités locales, sans remise en cause du rôle des communes, ni émergence d'une lisibilité de sa gouvernance plus démocratique »

Réorganiser les collectivités

La réflexion sur la réorganisation des collectivités territoriales, en particulier au niveau local, « s'impose d'autant plus que le Gouvernement a confirmé son intention de réformer de nouveau la taxe professionnelle, dont le législateur a fait la principale ressource fiscale de l'intercommunalité. Or, la suppression en 2003 de la part « salaires », qui en limite l'assiette à l'investissement des entreprises, puis le plafonnement de son produit, qui a réduit les marges de décision des collectivités, contraignent particulièrement les ressources de l'intercommunalité. La réforme de la fiscalité locale implique un réexamen de l'intercommunalité et de son financement. »



Simplicité, efficacité, économie de moyens

Ces perspectives doivent être l'occasion de réorienter l'intercommunalité vers « la simplicité, l'efficacité et l'économie des moyens » Au delà, il conviendra, comme la Cour l'avait déjà relevé dans son rapport de 2005, de reconsidérer les modalités du contrôle démocratique dans les intercommunalités. Les « conseils communautaires sont souvent pléthoriques. Le nombre relatif des représentants des petites communes, en général leur maire, est plus important que la part relative de leur population au sein de l'intercommunalité. Ce système d'élection au second degré des délégués des communes, qui remonte à plus d'un siècle, avec notamment la loi du 22 mars 1890 sur les syndicats de communes, semble atteindre aujourd'hui ses limites »

Le budget des intercommunalités représente le tiers de celui des communes, tandis que le montant géré par les seuls syndicats équivaut à celui des Régions! L'examen des grandes masses financières des communes depuis 2001 conduit à constater que l'essor de l'intercommunalité n'a pas eu pour effet de réduire les dépenses communales.

Etre conforme à la déclaration des droits de l'Homme

La Cour émet le souhait qu'à l'occasion des réflexions ouvertes par le Gouvernement sur les collectivités territoriales, en général, et sur l'intercommunalité, en particulier, la question de leur gouvernance soit abordée dans l'esprit de l'article 14 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen qui affirme que « tous les citoyens ont le droit de constater, par eux-mêmes ou leurs représentants, la nécessité de la contribution publique, de la consentir librement, d'en suivre l'emploi, et d'en déterminer la quotité, l'assiette, le recouvrement et la durée ».

Elagage radical de la carte des syndicats

La Cour des Comptes avance dix propositions. La Cour veut parfaire la carte de l'intercommunalité, en donnant au représentant de l'Etat les moyens juridiques de corriger les périmètres qui ne sont pas satisfaisants, notamment dans les aires urbaines et en milieu rural. Cet objectif pourrait être atteint en encourageant les fusions de communautés, avec, si besoin est, des périodes transitoires. Il pourrait aussi être atteint en rationalisant la coopération intercommunale, avec un élagage radical de la carte des syndicats, grâce notamment à des moyens juridiques nouveaux à donner au représentant de l'Etat pour prononcer la dissolution des syndicats dont les compétences sont ou peuvent être exercées par des intercommunalités.



Le Pays ne doit pas être un nouvel échelon

La Cour des comptés estime aussi que qu’il ne faut pas laisser prospérer le « pays » comme un nouvel échelon de collectivité, en réintégrant les moyens propres affectés à ces structures (associations, GIP ou syndicat mixte) dans les structures intercommunales existantes, et en orientant les aides de l'Etat et les aides communautaires vers les actions et projets définis dans un cadre intercommunal.

La proposition numéro 4 invite à « examiner de façon critique l'évolution et l'emploi des moyens en personnel de l'ensemble constitué par les intercommunalités et les communes membres afin de maîtriser leur croissance ». Il faut aussi proposer (proosition 5) » limiter les reversements aux communes membres de la fiscalité communautaire ». La Cour suggère ( proposition 6) de « moduler les dotations d'Etat en fonction du degré d'intégration des communautés, tant sur le plan de la fiscalité que des compétences réellement exercées. » Il faut aussi (proposition 7) améliorer l'information financière sur les comptes des établissements de coopération intercommunale et des ensembles qu'ils forment avec les communes membres.

Il est nécessaire aussi, de « développer l'information sur les moyens et les résultats des services publics locaux gérés sur le plan intercommunal et (9) d'accroître la vigilance face aux risques de dégradation de la situation financière de certaines intercommunalités. Enfin, la Cour suggère de donner aux modalités de désignation et de fonctionnement des conseils ou communautaires une meilleure lisibilité pour le citoyen.