vendredi 11 septembre 2009

La réforme de la taxe professionnelle agite aussi les élus

Après la taxe carbone présentée jeudi, la réforme de la taxe professionnelle (TP), autre grand chantier fiscal du budget 2010, suscite des remous parmi les élus de droite comme de gauche qui redoutent son impact sur les finances locales et le déficit public.

"Des parlementaires de la majorité craignent que la réforme ne se traduise par des difficultés pour les collectivités locales et certaines entreprises", explique à l'AFP le rapporteur général de la commission des Finances du Sénat, Philippe Marini.

"Ce qui est clair, c'est qu'elle alourdirait de manière durable de 5 milliards d'euros par an le déficit public", déjà plombé par la chute des recettes liée à la récession et par le plan de relance, s'inquiète ce sénateur UMP. La première année, le coût de la réforme sera même "de 9 à 11 milliards" en raison des "mécanismes de transition", selon une source parlementaire.

Afin de "garder des usines en France", le président Nicolas Sarkozy avait annoncé en février, en pleine crise économique, la "suppression" dès 2010 de la TP, qui taxe notamment les investissements productifs et est jugée comme un obstacle à la compétitivité de l'industrie française.

Finalement, la taxe sera remplacée par une Cotisation économique territoriale (CET) versée par les entreprises, reposant d'une part sur le foncier (Cotisation locale d'activité) et d'autre part sur la valeur ajoutée (Cotisation complémentaire).

Une architecture qui ne satisfait pas tout le monde.

"En 1999, on a supprimé la TP sur les salaires et aujourd'hui on veut cesser de taxer les investissements matériels", rappelle le président de la commission des Finances du Sénat, le centriste Jean Arthuis. "Or, la valeur ajoutée, ce sont justement les salaires et l'amortissement du matériel. La réforme est donc en contradiction avec l'objectif poursuivi".

Globalement, les entreprises vont tout de même y gagner. Selon des simulations de Bercy citées par une source proche du dossier, 17 à 18 milliards d'euros seront prélevés sur les entreprises, contre 24 auparavant.

Certes, quelques dizaines de milliers d'entre elles, principalement dans les services gourmands en main d'oeuvre mais nécessitant peu d'investissements, risquent d'y perdre. La ministre de l'Economie Christine Lagarde a assuré qu'au moins "95 à 98%" des entreprises bénéficieraient de l'opération.

Les organisations patronales réclament, elles, qu'aucune société ne verse davantage qu'elle ne le faisait avant la réforme.

Autre inquiétude, d'autant plus vive que la TP sert à financer le budget des collectivités locales: la réforme entraînera une chute considérable des recettes, entre 4 et 5 milliards d'euros par an selon Mme Lagarde, citée par les parlementaires qui l'ont auditionnée cette semaine.

Le montant définitif dépendra de la hausse parallèle à l'étude de certaines taxes, notamment sur les antennes de téléphonie ou les pylônes - EDF, la SNCF et les opérateurs téléphoniques étant parmi les grands gagnants de la réforme.

"Il y aura une compensation en 2010 et 2011 pour les collectivités locales. Ensuite on a peu de garanties sur son évolution", s'inquiète le président de la commission des Finances de l'Assemblée nationale, le socialiste Didier Migaud.

Le débat, relayé par des sénateurs de la majorité, agite les associations d'élus locaux, qui redoutent une "budgétisation" de leurs ressources.

"Seule la cotisation foncière des entreprises sera fixée au niveau local. Celle sur la valeur ajoutée sera fixée au niveau national puis redistribuée sous forme de dotation aux collectivités", détaille Philippe Marini. "Mais on ne sait pas si cette dotation va évoluer au même rythme que les dépenses locales".