mercredi 18 février 2009

Réforme des collectivités : les trois principales associations d’élus refusent un grand soir des territoires

Les trois principales associations d’élus affichent leur unité. Dans un courrier, adressé le 16 février au comité pour la réforme des collectivités locales, que s’est procuré « La Gazette », l’Association des maires de France (AMF), l’Assemblée des départements de France (ADF) et l’Association des régions de France (ARF) défendent une position commune. Une lettre, qui revêt les atours d’une introduction cosignée par les trois présidents des groupements. Puis, prend la forme de réponses à la liste élaborée par le comité « Balladur » des « questions à éclaircir » en matière territoriale.
L’AMF se charge là du volet communes et intercommunalités ; l’ADF et l’ARF du chapitre sur les départements et les régions.

Pour des chefs de file
La suppression de la clause de compétence générale ne figure pas au menu. Cette mesure était prônée, dans un passé encore très récent, par les présidents de l’AMF et de l’ARF, Jacques Pélissard (UMP) et Alain Rousset (PS). Elle est, en revanche, repoussée par le leader de l’ADF, Claudy Lebreton (PS). « Plus de 70 % des budgets régionaux et départementaux sont consacrés à l’exercice de leurs compétences propres. Seuls moins de 10 % de ces budgets sont consacrés à des domaines conjoints comme le sport, la culture, la vie associative » relèvent l’ADF et l’ARF. Toutes deux suggèrent de conférer, par la loi, une plus forte autorité aux régions en matière de développement économique. Pour l’action culturelle, elles indiquent privilégier la voie conventionnelle.

Mode de scrutin régional actuel
Surtout, les deux associations contestent la fusion des mandats de conseillers généraux et de conseillers régionaux au sein d’un corps de conseillers territoriaux. Une piste, prônée par les groupes parlementaires de la majorité, mais qu’écarte totalement Alain Rousset. Le patron de la région Aquitaine, interrogé par La Gazette le 18 février, parle d’« une idée assez perverse, totalement insensée » et d’« une déclaration de guerre ».
Le mode de scrutin régional actuel, « instauré par l’actuel Président de la République lorsqu’il était ministre de l’Intérieur », présente, aux yeux de l’ADF et de l’ARF, l’incomparable « avantage de dégager des majorités stables et fonctionnelles tout en permettant la prise en compte de la diversité, de la parité et la représentation des minorités politiques ».

Maintien des pouvoirs des communes
L’AMF, dans ses réponses, promeut également le système territorial actuel. Selon elle, les métropoles, dont le comité « Balladur » semble souhaiter l’avènement, ne peuvent « pas devenir des collectivités de plein exercice se substituant aux communes ». « Seule la commune doit détenir une clause de compétence générale, les structures intercommunales ne devant exercer que des compétences d’attribution » ajoute-t-elle.
L’association centenaire se prononce implicitement en faveur d’un fléchage des conseillers communautaires sur les listes lors du scrutin municipal de 2014. Une piste que défend aussi le secrétaire d’Etat à l’Intérieur et aux collectivités territoriales, Alain Marleix.
L’AMF se montre « tout à fait favorable » au principe d’« une administration unique au niveau intercommunal » intégrant les services municipaux de la ville-centre sur le modèle de Strasbourg. De même, elle « n’est pas opposée à la définition de l’intérêt communautaire par le conseil communautaire des communautés de communes » et non par les conseils municipaux eux-mêmes.

Position post-« Valletoux »
Sur le plan financier, l’AMF, l’ADF et l’ARF s’en tiennent aux consensus qu’elles sont parvenues à dégager après le rapport « Valletoux » du Conseil économique et social de 2006. Elles marquent ainsi, à l'heure de la suppression de la taxe professionnelle demandée par le Président de la République leur attachement à un lien entre les entreprises et les territoires. Elles demandent par là, aussi, le transfert d’une part d’un impôt national à leur profit.

Le rapport du comité « Balladur » devrait faire l’objet d’un vote dans la semaine du 23 février. Un signe que ses conclusions ne suscitent pas un consensus : Pierre Mauroy (PS), vice-président de l’instance, ne masque pas son hostilité à l’égard de la fusion des mandats de conseillers généraux et de conseillers régionaux, souhaitée par d’autres membres du comité, comme Dominique Perben (UMP). Les conclusions du comité « Balladur » devraient être rendues à Nicolas Sarkozy à la fin du mois de février ou au tout début du mois de mars.
Alain Rousset redoute une « recentralisation ». « Or être jacobin, confie-t-il, c’est être incompétent. Car cela signifie ne pas avoir confiance en soi et remettre son sort à d’autres. Il faut en finir avec cet appel très judéo-chrétien, à rechercher toujours le père à travers l’Etat. » En clair, la tâche du comité Balladur se complique chaque jour un peu plus ; un consensus, même minimal paraissant de plus en plus difficile à dégager. Le rapport de forces entre l'Etat et les représentants des collectivités semble inévitable.