jeudi 24 septembre 2009

Réforme territoriale : la grogne des conseils généraux

Source : Le Figaro

«Tout cela va finir par se dégonfler», assurait mercredi un élu UMP en contemplant la montgolfière que le conseil général du Puy-de-Dôme avait affrétée au Palais des congrès de Clermont-Ferrand, à l'occasion du 79e congrès de l'Assemblée des départements de France (ADF). «Rassure-moi, tu ne parles pas de la réforme ?» a répondu du tac au tac un collègue socialiste, hilare. Mardi et mercredi, les présidents de conseils généraux ont tous fait part, qui de leurs inquiétudes, qui de leurs récriminations, quant à cette réforme des collectivités locales préparée par Brice Hortefeux.

Dans une atmosphère houleuse, le ministre de l'Intérieur s'est défendu de toute «provocation», «mise en accusation de telle ou telle majorité politique» ou «procès de tel ou tel niveau de collectivité». Création des conseillers territoriaux, intercommunalités, métropoles seront inscrites dans le projet de loi que le gouvernement présentera d'ici un mois. La clarification des compétences devra «aboutir dans un délai de deux ans après le vote de la réforme», a-t-il dit.

De quoi apaiser les inquiétudes ? Pas vraiment. La crise et la suppression de la taxe professionnelle échauffent les esprits. Lors du débat sur le projet de loi de finances qui débute le 2 octobre, les parlementaires devront «décider», selon Hortefeux, des «nouvelles ressources de compensation» pour les collectivités territoriales.

La gauche est vent debout sur cette question. «À trois mois du vote de nos budgets, personne ne sait sur quelle base les bâtir, tonne le président PS de l'Ariège, Augustin Bonrepaux. Et en plus le gouvernement demande aux parlementaires de faire le sale boulot en nous partageant des recettes en diminution.» Arnaud Montebourg (Saône-et-Loire) présage, lui, qu'«il y aura des départements en faillite». «Bientôt, nous ne pourrons plus assurer que les dépenses qui sont obligatoires. Allons-nous devenir les agents élus de l'État pour des politiques qui ne sont pas les nôtres ? Attendez-vous à des rébellions», poursuit-il. Moins volcanique, le président de l'ADF, Claudy Lebreton (Côtes-d'Armor), s'est défendu de rejeter en bloc le projet. «Mais sur deux textes de cent articles, a-t-il expliqué, vous comprendrez que nous ne nous arrêtions pas aux articles qui nous conviennent et que nous nous focalisions sur ceux, une majorité, qui heurtent profondément la majorité des présidents de conseils généraux.»

«La charrue avant les bœufs»

Ces inquiétudes trouvent un écho à droite. «On met la charrue avant les bœufs, soupire le président de Haute-Loire, Gérard Roche. Les parlementaires vont arrêter nos ressources avant que soient définies les structures et leurs compétences.» «Notre collègue de la Sarthe, Roland du Luart, déjeune aujourd'hui avec François Fillon pour lui expliquer pourquoi il ne parviendra pas à voter son budget», témoigne Anne d'Ornano (Calvados). «La seule collectivité qui perd des élus, c'est le département. C'est inacceptable», fustige Philippe Adnot (Aube). La réforme a pour finalité, «ne nous voilons pas la face, de récupérer un certain nombre de régions», dit-il . «S'il y a trop d'élus, l'effort doit être partagé», explique pour sa part son collègue de la Marne, René-Paul Savary. Les élus de droite ont également réaffirmé plusieurs principes «incontournables» sur le plan fiscal : compensation des actions sociales par l'État, autonomie fiscale des départements et mise en place d'une solidarité entre territoires. Des recommandations qu'ils ont adressées aux parlementaires de la majorité. Les élus de gauche ont signé une motion conclusive menaçant le gouvernement de ne plus apporter leur part dans les investissements cofinancés avec l'État. Certains veulent même porter l'affaire devant les Français, qui arbitreraient par référendum. À six mois des régionales, Brice Hortefeux souhaitait une «réforme simple et pragmatique, loin des querelles stériles». Elle sera, plus que jamais, politique.